70
Candidats
4
Admissibles
3
Nageurs
1
Elus

Au printemps 2013, lors de son lancement, j’ai passé les tests de sélection de 42 ; au départ par curiosité car tout ce qui représente une innovation pédagogique m’intéresse ! Il se trouve que j’ai été admissible… Autrement dit, retenue pour passer l’épreuve de la piscine ! Le 12 août 2013 ont donc démarré pour moi 4 semaines très intenses parmi 1000 candidats et j’ai décidé, pour me sentir accompagnée, de vous raconter mon aventure en immersion au sein de la première promo de 42, au jour le jour…

PROLOGUE

800 candidats étaient présents au premier jour de cette piscine, il y a donc eu quelques désistements. Environ 7% sont des filles… L’arrivée dans les locaux est assez impressionnante : 3 salles de 300 iMacs chacune sur trois étages. Le sous sol est entièrement destiné aux squatteurs, les courageux qui ont décidé de dormir sur place… Des douches sont à disposition des nageurs et on peut acheter à manger dans l’école. Comme je l’avais pressenti, nous avons directement été invités à nous placer à notre poste et à démarrer l’épreuve. Pas de discours, pas d’explication, pas de consigne. Déroutant mais innovant. Plutôt agréable dans un sens d’éviter le folklore d’une rentrée car parfois un peu superflu mais c’est aussi générateur de stress de sauter directement dans le grand bain.

JOUR 1

Aujourd’hui, grand plongeon ! Et j’ai un peu bu la tasse… L’immersion en piscine démarre directement. Une fois installés, nous nous sommes connectés à notre espace personnel pour y découvrir quelques vidéos (courtes) présentant, la charte, la pédagogie (évaluation par les pairs notamment) de 42, et les logiciels et langages qui seront utilisés lors de la piscine. Le début de la journée a été assez bruyant, à cause du stress et des incertitudes de la majorités des nageurs.

Rapidement, on regarde à droite à gauche, on se compare et clairement, on en voit certains qui se démarquent. C’est évident que c’est lors de la première journée que les disparités sont les plus grandes : certains n’ont jamais programmé, d’autres sont presque pros… Je dois dire que j’étais complètement perdue et en proie à de gros doutes tout au long de la journée. Je ne comprenais presque rien de ce que je lisais et de ce que je faisais. 10 fois dans la journée, je me suis dis « c’est pas pour moi, je ne vais pas y arriver, j’ai envie de partir » et 10 fois, j’ai lutté pour rester et continuer les exercices. Je ne m’y attendais pas mais c’est vrai que les stigmates du système scolaire français font qu’on a tendance à se décourager vite. Heureusement, tout le monde s’aide et l’ambiance est vraiment très agréable. Heureusement aussi, un petit événement m’a beaucoup rassurée : les filles ont toutes été convoquées ensemble en milieu de journée pour écouter le chaleureux message du Directeur Général : le milieu de l’informatique est carrément sexiste et souffre d’un manque de profils variés. Les filles sont donc « précieuses » à 42 : on nous a clairement expliqué que l’on serait « protégée » du sexisme des candidats masculins et encouragée à persévérer.

15 heures par jour c’est long et vers 18h-19h tout le monde commence à craquer (fou-rire, fatigue,…) et c’est aussi à ce même moment de la journée que j’ai découvert que je n’étais pas seule à galérer : les autres noyés, comme moi, qui restaient silencieux, comme moi, parce que complexés, comme moi, ont commencé à manifester leurs angoisses (via les forums et le système de messagerie instantanée interne). Et c’est là qu’on relativise. J’ai vu de l’entre-aide, de la générosité et avec surprise de l’humanité aujourd’hui.

Je n’ai pas tenu jusqu’à minuit, j’espère faire mieux demain.

JOUR 2

Tous les matins, on s’inscrit au projet de la journée. Chaque projet contient plusieurs exercices que l’on doit rendre pour le lendemain soir à 23:42 ; tout un symbole !

Entre hier et aujourd’hui, la moulinette est passée… La moulinette c’est le correcteur automatique qui compte les points de chacun ; et j’en ai obtenu très exactement zéro… La moulinette s’arrête de corriger dès qu’elle rencontre une erreur, ce qui veut dire que mon premier exercice du premier projet est faux… C’est une mauvaise note, mais à relativiser puisque sur 800 nageurs, près de 500 ont reçu la même, et une cinquantaine à peine a eu la moyenne. La moulinette est un indicateur qui intervient chaque nuit pour nous permettre de corriger le tir le lendemain puisque chaque projet s’étale sur 2 jours. Mais comme un nouveau projet arrive chaque jour, j’ai dû, aujourd’hui, travailler sur la première série d’exercices et sur la deuxième…

Ce qui est difficile à gérer, c’est que le contenu des sujets (valeurs, consignes,…) sont susceptibles de changer à tout moment, ce qui veut possiblement dire aussi au dernier moment… Ca implique pas mal de vigilance et de précision. Heureusement, la notation ne se limite pas à la moulinette et elle est largement complétée par la notation par les pairs. Nous allons tous nous noter pendant la piscine, nous rencontrer et discuter, ce qui veut dire que les notes générées par le peer to peer seront théoriquement plus humaines. Je me suis sentie plus à l’aise aujourd’hui car j’ai compris beaucoup de choses en corrigeant les exercices du premier projet et j’ai abordé le deuxième plus sereinement. Mais comme il est dit dans un commentaire, les 2 premiers jours servent à prendre la main sur Shell mais c’est au 3e jour que commencent les choses sérieuses…

JOUR 3

Aujourd’hui, ma journée de travail a « réellement » commencé en début d’après-midi puisque pendant la matinée nous nous sommes notés entre nageurs. Chaque nageur doit noter 5 nageurs et être noté par 5 nageurs. Ca prend du temps car nous devons rencontrer les nageurs que l’on corrige et les nageurs qui nous corrige. Je n’étais pas encore arrivée à l’école le matin que déjà, j’avais des appels de nageurs qui me cherchaient pour me noter ou se faire noter.

On a donc tous pu expérimenter le « social learning » : corriger les exercices de quelqu’un implique qu’on les ait bien compris. La notation entre pairs permet de discuter, d’expliquer et d’assimiler les concepts. De la même manière que la moulinette, on a pour consigne de s’arrêter de corriger une série d’exercices dès que l’on rencontre une erreur. Ce qui implique que l’on reçoive parfois des notes différentes selon que le nageur noteur a compris les exercices, su détecter une erreur (qui peut passer inaperçue pour d’autres), a respecté les consignes de notation, etc. C’est important de les respecter car on sera ensuite évalué par la machine (autre sorte de moulinette) sur notre façon de noter, sur notre précision et notre rigueur : impossible donc d’attribuer des notes au hasard ! En plus de ça, les nageurs doivent eux-aussi évaluer la façon dont les noteurs les ont évalués… Grosso modo, on fait un feedback sur le feedback. Bref on est à fond dans le peer to peer.

L’après-midi, on est rentré dans le vif du sujet : le C (langage utilisé pendant la piscine). Ca n’a pas été évident de changer de langage du jour au lendemain, mais j’ai trouvé que je m’y suis adaptée plus rapidement que le premier jour : j’étais déjà dans le bain, et ma façon de « penser » avait déjà changé… En fait on re-programme notre cerveau sur un autre mode de communication, de langage, d’interprétation et de compréhension. Comme si on découvrait les mathématiques pour la première fois. Il y a des réglages à faire et un nouveau regard à adopter. C’est très enrichissant, je suis contente de ne pas m’être découragée le premier jour et d’avoir pu découvrir ça.

JOUR 4

Aujourd’hui, j’ai reçu ma note de la première journée (résultat de la notation par les pairs, vérifiée et attribuée par la Moulinette) et j’ai eu 16/20 ! Ce qui est plutôt très bien. Mais bizarrement, j’ai eu dans l’après-midi une grosse baisse de moral face au C… La moindre erreur est fatale, un espace en trop, un point virgule en moins et c’est 0 à l’exercice. D’autant plus, qu’on a interdiction de coder n’importe comment : on a un manuel de toutes les normes à respecter et désormais, en plus de la Moulinette, il y a aussi la Norminette qui passe… L’exigence est maximale et intraitable !

En toute fin de soirée, j’ai eu un long fou-rire que j’ai eu beaucoup de mal à réprimer ; résultat de la fatigue et de la nervosité sans doute mais je pense que je n’étais pas la seule à « craquer » aujourd’hui : j’ai croisé dans la journée des nageurs en train de couler… Certains étaient assis par terre, la tête dans les mains ou les larmes aux yeux… Il y a déjà eu près de 150 abandons depuis le début de la piscine… J’espère que je gérerai mieux demain parce que je suis en train de prendre de plus en plus de retard sur les exercices !

P.S. : c’est marrant parce parfois en fin de journée, je reçois des textos de nageurs (qui avaient du me joindre pour me corriger ou se faire corriger par moi) qui n’ont pas toujours grand chose à voir avec 42.

JOUR 5

Journée forte en émotions !

J’étais déjà en train de me noyer dans le C et de subir à nouveau une baisse de moral qu’un événement a chamboulé ma journée : lors des corrections par les pairs, un voisin de mon correcteur a compris (à ma façon d’expliquer/justifier une fonction utilisée dans un de mes exercices) que j’avais triché…

[La notion de tricher n’est pas à entendre au sens traditionnel : à 42, on a le droit d’aller sur internet, de discuter et de réfléchir à plusieurs. MAIS, même si on est censé brainstormer en groupe, il faut quand même être capable de refaire les exercices seul (il ne suffit pas de comprendre, il faut savoir refaire ; on a tendance à confondre) et évidemment, il m’est arrivé que, pour des exercices, des nageurs voisins trouvent des solutions que je n’avais pas et que j’ai réutilisées sans vraiment les maîtriser… Lorsque, lors d’une correction, un noteur s’aperçoit qu’un noté n’est pas capable de justifier un exercice, alors ça doit être considéré comme un cas de triche et il doit lui attribuer la note de -42].

et est allé, alors que cela ne le regardait/concernait pas, reporter au staff que… je trichais o_O Donc gros coup de pression pour moi, puisque un membre du staff est venu me voir pour me le signifier et me dire que j’avais donc la note de -42 pour la journée. C’est la règle et je respecte, je ne conteste pas la punition mais quand un nageur corrige un « tricheur », il lui met simplement -42, rien n’exige qu’il doive le dénoncer… D’un naturel sensible et émotif, j’ai mal vécu ce que j’ai subi comme une délation, quasi publique, puisque très vite la rumeur a fait son chemin dans la salle. J’ai été choquée à l’idée que des nageurs essaient sans scrupule d’en faire couler d’autres. La goute d’eau qui a fait débordé la piscine c’est que j’ai entendu dire qu’on aurait dit que quelqu’un aurait reporté que j’étais « trop jolie pour programmer » (pour répondre à certains commentaires, voilà un exemple typique) et donc que c’était déjà, de fait, « suspect »…

Avec le stress et la fatigue accumulés, (plus le fait que pas mal de nageurs se sont préoccupés de la situation, à qui je devais raconter ce qui m’étais arrivé), j’ai senti que j’allais craquer : j’ai dû sortir pour pleurer loin des regards. Je suis restée un moment à l’extérieur du bâtiment à me répéter que je n’étais pas capable de résister à ça, ni de gérer la suite de la journée ; ce qui forcément allait entraîner un retard dans mes exercices et mes acquisitions. Je paniquais et j’allais abandonner. Je n’avais plus pied.

Après qu’une nageuse amie m’ait descendu mes affaires (j’étais incapable de remonter et de devoir expliquer à mon groupe que je voulais partir et leur dire au revoir, parce que comme quoi, on s’attache très vite ici), je me suis dirigée vers l’accueil et ai demandé la procédure à suivre en cas d’abandon. Je me suis donc entretenu à l’écart avec un des moniteurs pédagogiques. J’avais du mal à retenir les pleurs mais on a parlé quand même un long moment, durant lequel le moniteur a tout fait pour me convaincre de rester. J’étais très décidée à partir mais j’ai été très touchée par l’implication et l’amitié de l’équipe pédagogique. Il m’a proposé de rentrer chez moi pour me reposer, de bien réfléchir avant de prendre une décision et de revenir le lendemain. Ce que j’ai accepté.

En sortant du bâtiment, un nageur ami était là. On parle quelques minutes et il arrive à me faire rire et à me détendre. Sur le coup, me sentant triste de partir, déçue d’abandonner, je suis… remontée dans la salle avec lui. Je n’ai donc pas abandonné et j’ai repris ma place. Comme d’habitude, ça m’a servi de leçon : il faut savoir perdre mais jamais se dire que la Terre s’arrête de tourner. J’ai été émue par la solidarité des nageurs qui s’est créée autour de moi et de mon cas, eux aussi un peu abasourdis par l’attitude du nageur dénonciateur. J’ai donc passé l’exam machine (tous les vendredis) : exam de 4h, corrigé par la Moulinette, sans possibilité d’aller sur internet, d’avoir ses notes sous les yeux, ni de discuter avec les autres. J’avais du mal à me concentrer mais c’est passé et c’est pas grave. Chaque jour est une victoire et on verra demain.

JOUR 6

Avant toute chose, je tiens à remercier tout le monde pour tous les chaleureux messages d’encouragement que j’ai reçus. Tout est allé beaucoup mieux : j’ai progressé en C et j’ai gardé le sourire toute la journée. Premier jour du premier weekend aujourd’hui, et comme tous les weekends de la piscine, on doit passer une « colle ». C’est un projet à faire en groupe (imposé) de 4 nageurs. On passe ensuite une soutenance le lundi ou le mardi : il faut choisir un créneau. Dans mon groupe de 4, un a abandonné et un autre nous a dit qu’il voulait abandonner… Autrement dit, on est 2. Ce qui est intéressant dans cet exercice, c’est que lors de la soutenance le nageur qui a le plus de difficultés à expliquer l’exercice ou à répondre aux questions reçoit la note ; et cette note devient la note du groupe. Ca oblige les moins bons à ne pas se reposer sur les autres pour ne pas prendre le risque de pénaliser le groupe, et les plus forts à faire en sorte d’être pédagogues et de bien expliquer les exercices pour ne pas être pénalisés eux-mêmes. C’est la magie du peer-to-peer. Ca engage plus de responsabilité et ça nous force à comprendre les exercices. Question pédagogie, c’est idéal.

JOUR 7

Je crois que ça a fait bizarre à beaucoup de nageurs d’être là un dimanche… Tout le monde a nagé moins vite !

Ca fait maintenant une semaine que je suis à la piscine et j’ai l’impression de connaître certains nageurs depuis des semaines. Des amitiés se sont nouées très vite un peu partout. Seuls quelques cas très isolés font encore le voyage en solitaire. Et ce n’est pas ceux qui s’en sortent (sauf si doués au départ). C’est ce qui est arrivé à une fille il y a deux jours je crois. Elle est partie après s’être fait railler par des nageurs qui essaient (par tous les moyens on dirait) de couler les étrangers à leurs mondes. Leurs aliens à eux. Finalement, on est tous l’alien de quelqu’un ici… C’est ce qui me fait penser que les nageurs se regroupent en catégories :

– les vrais geeks,

– les scolaires/sérieux/qui prennent de l’avance,

– ceux qui se disent qu’ils vont devenir riches,

– les nageurs qui ne savent pas ce qu’ils font là,

– les noyés,

– ceux qui recherchent des opportunités de business (en gros ceux qui partent à la pêche aux devs),

etc.

Finalement, en dehors des capacités de chacun, j’ai l’impression que la réussite à la piscine tient largement de la qualité (sociale, variée et technique) de l’équipe de laquelle on s’entoure.

Maintenant que j’ai fait de tour de ce à quoi ressemble une semaine de piscine au niveau des activités pédagogiques, je vais commencer une série de billets sur les OFF. What happens in 42, stays in 42… et un peu sur cette page. Après avoir discuté avec pas mal de nageurs, je pense avoir assez de matière pour raconter ce qui se passe pendant la piscine en dehors des projets, des exams et des colles. Et il s’en passe des choses…

JOUR 8 //SPECIAL WTF

WTF, de l’anglais What The F***, c’est l’expression que j’ai choisie pour la première de cette série de OFF : pour faire référence à toutes les fois où l’on peut assister à une scène à 42 en se disant « mais qu’est ce qui se passe ici ???? ». Bref, depuis le début il y en a eu beaucoup, surtout la nuit, quand les nageurs relâchent la pression…

C’est vrai que le rythme de travail est très intense et c’est important de pouvoir exulter…

Tout est parti d’un anniversaire. Un nageur a eu 18ans et pour la peine, dans la journée, il s’était fait attaché avec du film alimentaire à un arbre. Il semblait consentant mais pour ne pas l’accabler publiquement je préfère vous montrer une reconstitution de la scène avec une victime volontaire :

A part ça, voilà le type de sms que l’on peut recevoir : « Bien le bonjour puissant gladiateur, après le génocide Sastantua perpétré par 3 pingouins et 1 banane, je viens vous prévenir que je suis complètement disponible pour me faire corriger dans la douceur. Lok’thar ogar voyageur intergalactique.  » Véridique, je l’ai reçu aujourd’hui.

Les résultats de la piscine de juillet sont tombés. Il semblerait que 300 nageurs aient été admis à 42.

NUIT 1

Pour les nageurs qui ne sont pas parisiens, ni de la région, ou qui n’ont pas pu squatter chez quelqu’un, faire la piscine c’est aussi dormir à 42.

Pas de dortoirs, juste des pièces vides mises à disposition des nageurs. Un sac de couchage, une serviette de toilette et ça y’est t’as meublé ton « chez toi » à 42. Chanceux sont ceux qui ont pensé à ramener un matelas gonflable. Pour les autres, rien ne vaut la dureté du sol pour « processer » et se remettre les idées en place. C’est donc assez sommaire. C’est presque du camping mais ça renforce les liens entre les nageurs. On est proche de l’esprit colonie de vacances.

A partir de 23h42 (heure butoir pour le rendu des exercices de la journée), l’ambiance studieuse laisse la place à tout autre chose. Les jeux prennent le dessus : poker en ligne, tournois de League of Legends, etc. Il faut bien se changer les idées. A l’exception de quelques rares codeurs nocturnes qui sont sans doute plus efficaces la nuit et qui travaillent dans le Heart of Code (rez de chaussée), aux 2e et 3e étages, les autres relâchent complètement la pression (cf. JOUR 8 //SPECIAL WTF).

Puis, quand la fatigue gagne les nageurs (vers 2h du matin en moyenne), ils vont se coucher ; sauf cas de nuit blanche, ce qui est déjà arrivé plusieurs fois depuis le début de la piscine, et dans ce cas, les nageurs partent dormir en journée (certains sont d’ailleurs complètement décalés). Pour la plupart, ils descendent au sous sol, marchent le long des serviettes de toilettes qui sèchent sur les rampes des escaliers, et essaient de se frayer un chemin entre les matelas et sacs de couchage en évitant de faire trop de bruit.

Il arrive parfois, à cette heure là, de faire des rencontres bizarres et inattendues… Voici les propos rapportés d’un nageur ami : « Hier soir, un mec m’a proposé des fruits secs d’origine chinoise en me confiant que ça me rendrait plus fort pour la piscine puis il m’a raconté sa vie. Je ne sais pas si c’était la fatigue ou autre chose mais il n’avait pas l’air clair du tout ».

Que ce soit avant ou après dormir, il y a aussi le moment de la douche à passer et là c’est un peu la loterie. Il faut avoir le bon timing au risque d’attendre des plombes. Normalement, c’est tard dans la nuit.

Ce qui est drôle avec le temps mais bizarre au début, c’est de s’endormir seul dans un coin et de se réveiller avec 2-3 autres nageurs, que l’on ne connait pas ou de vue, en train de dormir à 30cm de soi.

Une chose indispensable pour survivre : avoir le sommeil lourd car les néons restent allumés toute la nuit (j’en ai vu dormir sous les tables pour se protéger de la lumière). Dormir profondément, c’est aussi très utile pour éviter de devenir fou à cause des ronflements de certains. Rappelez-vous (extrait du règlement de 42) : « Si vous ronflez, félicitations. Sinon, courez à la pharmacie vous acheter des boules Quies ». Et si on a le malheur de s’endormir aux premières heures du matin, le sommeil est mis à rude épreuve : il fait jour (pas de rideaux ni de volets), les femmes de ménage font les sols (aspirateurs, serpillières) et il faut se lever pour les laisser travailler. Ensuite les nageurs qui sont du matin débarquent et passent devant les dormeurs pour rejoindre leur salle de travail… Bref moi je vais me coucher, je suis fatiguée !

JOUR 10 //SPECIAL STAFF

Avant de faire la piscine, j’avais entendu des rumeurs à propos du staff de 42 selon lesquelles ses membres sont un peu rudes avec les nageurs et les envoient nager quand ils leur posent une question. C’est la raison pour laquelle, depuis mon arrivée, je n’ai pas posé une seule question au staff… mais j’ai regardé les autres faire 🙂

En réalité, ils ne sont pas si méchants que ça. C’est juste qu’il ne faut pas poser une question (sauf technique, du type problème avec l’ordinateur lui-même) dont on pourrait trouver la réponse sur Google (autrement dit à peu près tout)… On peut se voir répondre à une question : « Je ne sais pas, cherche ! » ; « Google est ton ami » ; « Demande à ton voisin de droite et s’il ne sait pas à ton voisin de gauche » ; « Ce n’est pas mon problème, ce n’est pas moi qui fait l’exercice » ; « Réfléchis » ; etc. mais toujours avec un sourire. Autrement dit, ce n’est pas par pur dédain.

[En revanche, c’est encore pire si on monte au « Bocal » (QG des membres du staff) pour poser une question, parce que là, en plus de se faire recaler, on a fait le voyage pour rien].

Et ce n’est pas non plus par fainéantise, c’est simplement que les membres du staff ont reçu la consigne stricte de laisser, au maximum, les nageurs se débrouiller tout seuls. Et ce n’est pas plus mal. Cela force à trouver par soi-même les solutions à un problème ou à les chercher tout simplement, ce qui arrive très fréquemment dans la vie professionnelle — il n’y a pas un prof qui nous accompagne tout le temps et qui nous dit quoi faire dans tel et tel cas… C’est donc logique, et il faut s’y entrainer dès maintenant.

En dehors des réponses lapidaires du staff, ils s’amusent aussi un peu avec nous : tous ceux qui se sont déjà faits avoir ne laisseront plus jamais leurs sessions ouvertes… (plus de détails à venir dans un SPECIAL TROLL). Cela aussi c’est un bon entrainement, car pour l’avoir vécu dans ma vie professionnelle, il vaut mieux ne pas oublier de « log out » (verrouiller) sa session sur son ordinateur de travail avant de s’absenter, même 1 minute.

Les nageurs ont interdiction de manger ou de boire dans les clusters (salles de travail) au risque de se faire tirer dessus par un membre du staff avec un pistolet à fléchettes-ventouses… ou pire de prendre un TIG (Travail d’Intérêt Général). Et aucun nageur n’a envie de nettoyer tous les écrans d’ordinateur (environ 1000), ni de lustrer les tuyaux avec une brosse à dent (ils ne manquent pas d’inspiration). Donc la règle est à peu près respectée…

RUSH DE 24h

TRAILER@42 – Piscine J09 par studios_42

Hier soir, nous avons démarré une épreuve qui dure 24h… L’épreuve du rush, encore appelée Journée 24. Voici le mail, plein d’humour, que l’on a reçu de la part du staff la veille : « L’épreuve commence dès le 22 août à 18h. À chaque début d’heure, un nouvel exercice est proposé, jusqu’à arriver à 24. Le rendu est exceptionnellement avancé au 23 août à 18h, soit juste avant l’examen machine ».

Vous l’avez compris, ce sont enchainés l’épreuve du rush (de jeudi 18h à vendredi 18h) et un exam machine (vendredi de 18h à 22h)… Evidemment, pour ce type d’épreuve c’est davantage l’endurance qui est prise en compte, plus que la réussite des exercices en eux-mêmes. Et évidemment aussi, c’est moins terrible qu’on ne le pense puisque chaque exercice qui tombe n’est pas à rendre dans l’heure. C’est seulement qu’un nouvel exercice tombe chaque heure, mais il est tout à fait possible (et d’ailleurs c’est ce que presque tout le monde a fait) d’aller dormir puis de revenir terminer l’épreuve. En bref, on a 24 exercices à faire en 24 heures, mais chacun s’arrange et s’organise comme il veut. J’aurais pu, mais je n’ai pas fait de nuit blanche comme certains nageurs, et me suis couchée à 3h du matin (seulement).

Etant donné que cette épreuve dure 24h, l’équipe de 42 a trouvé qu’elle s’apparentait au principe de à la série « 24 heures chrono » et a filé la métaphore tout au long du rush : des clins d’oeil étaient glissés dans les énoncés et surtout, surtout… toutes les heures, cette petite musique* résonnait dans tous les clusters pour signaler l’ouverture de l’accès à un nouvel exercice :

En fin de compte, une ambiance très sympa : ce compte à rebours qui sonne le glas toutes les heures et qui génère un petit stress stimulant, plus la perspective de passer tous ensemble 24 heures d’affilées (dont une nuit) sur des exercices, c’était plutôt grisant.

J’ai fait ce que j’ai pu et j’ai pensé à me reposer avant de passer l’exam machine, que j’ai d’ailleurs beaucoup mieux vécu que la première fois. Parce qu’on s’habitue :

– aux procédures : on doit ouvrir le sujet de l’examen en utilisant des commandes via le terminal duquel on code. Puis, de la même manière, créer un fichier « auteur » dans lequel on renseigne son login pour que la Moulinette nous reconnaisse, sans quoi, nous ne sommes pas corrigés.

– aux règles : le staff n’a pas eu besoin de nous demander d’éteindre nos téléphones portables (si un téléphone sonne pendant un exam machine, son propriétaire et toute sa rangée reçoivent la note de 0…)

J’imagine que tous les nageurs vont tous bien dormir avant d’attaquer le weekend (qui commencera pour la plupart je pense samedi vers midi ^^) et l’épreuve de la colle.

*Son du compte à rebours dans la série 24 heures chrono.

JOUR 13 //SPECIAL NOTES

La journée des 24 heures me permet de faire une excellente transition avec ce « spécial notes ».

En effet, il serait injuste de demander à des étudiants (dont certains complètement néophytes) de réussir autant d’exercices dans les conditions décrites plus haut. En réalité, ce n’est pas ce qu’attend 42. Je n’en avais pas encore parlé jusqu’à maintenant mais tous les nageurs se sont rendus compte assez rapidement qu’à 42, ou tout du moins à la piscine, les notes ne veulent rien dire… et ne préfigurent que très peu notre admission à l’école.

Aux premiers jours, nous pensions que les notes que l’on se verrait attribuer chaque jour étaient délivrées par la Moulinette. En fait, le critère de notation change chaque jour. Et c’est ça qui est véritablement génial, c’est que l’on ne sait jamais sur quoi on est noté, (du moins on le sait a posteriori, quand les notes sont tombées et que le barème est dévoilé).

Par exemple, pendant le premier weekend, on avait un projet pour lequel il fallait écrire une fonction qui permette de dessiner une pyramide identique à celle illustrée dans la consigne. Un exercice complexe pour les débutants mais faisable pour ceux qui ont déjà de l’expérience en programmation. A en voir certains se casser la tête dessus (des nageurs amis sont parvenus à faire la pyramide mais sans la porte, ni la clé ; « de dos » comme ils aiment le dire), et étant incapable de sortir LA fonction, j’ai rendu copie blanche. Le lendemain, lors de la notation par les pairs, les nageurs s’attribuaient donc soit 0/20 (la fonction n’exécute pas ou exécute une pyramide non identique) soit 20/20 (la pyramide s’affiche parfaitement). J’ai donc eu 0.

Mais en me connectant sur mon espace, je découvre ma note finale au projet Sastantua et je vois 5. Perplexe, je clique dessus pour comprendre : « Cette note est la moyenne des appréciations reçues en tant que noteur. Elle est sur 5 ». Pour cet exercice, la notation par les pairs a été prise en compte malgré les 0/20 ou 20/20 qu’on eu certains. C’est donc notre capacité à noter les autres et les appréciations que l’on a reçues en retour qui ont compté.

C’est pour moi, une révolution formidable dans le système éducatif car elle nous permet de nous écarter de l’idée selon laquelle un élève, depuis sa perception personnelle, est une note, représenté par sa copie uniquement. A 42, les nageurs ne sont pas les exercices qu’ils rendent ; mais beaucoup plus !

JOUR 14

Déjà deux semaines et j’ai l’impression que ça fait une éternité, dans le bon sens du terme !

Ca a été une journée un peu étrange pour moi car demain je dois reprendre mon activité professionnelle… Mais je n’arrête pas la piscine pour autant : je continuerai de venir tous les soirs et les weekends et évidemment je continuerai ma chronique, parce que ce qui se passe dans cette école est trop important.

Je redoute un peu le retour dans le « monde réel » et je suis déjà un peu nostalgique… Heureusement, je pourrai toujours revoir mes têtes de geek préférés !

Pour ce qui est des projets et des exercices, je ferai tout ce que je peux dans le temps qui m’est imparti !

JOUR 15 //SPECIAL AMOUR

J’ai l’impression de mener une double vie, ou en tout cas d’avoir eu deux journées en une… J’ai fait ma journée de travail – de bureau – normale, puis j’ai pris le métro direction 42 à une heure où les gens en général rentrent chez eux. C’était assez bizarre mais j’étais tellement contente de revenir à l’école, mon iPod jouait la musique que j’écoute à chaque trajet vers 42, que je me suis directement remise dans l’ambiance en entrant dans le HOC (Heart of Code).

Du coup, j’ai travaillé plus vite que d’habitude la première heure : j’ai fait mes corrections peer-to-peer, me suis inscrite au projet du jour suivant, ai suivi les quelques vidéos de cours, et ai commencé les exercices à rendre pour le lendemain. Evidemment, le niveau a monté d’un cran et il parait que ce sera encore pire demain, alors je me suis sentie un peu perdue mais des nageurs amis étaient là pour m’aider.

Ca risque d’être fatigant ce rythme de travail mais c’est la seule solution que j’ai trouvée pour pouvoir continuer la piscine et pour avoir la satisfaction d’être allée jusqu’au bout, de ne pas abandonner. Mais c’est aussi parce que je me suis attachée aux gens ici et que j’ai besoin de rester en contact avec eux, de me dire que je fais toujours l’aventure avec eux.

D’ailleurs, c’est touchant, parce que malgré l’univers a priori masculin, ou dur de la compétition/rigueur/etc. cela n’entrave pas les comportements habituels que l’on retrouve dans tout groupe social. Des nageurs/euses se plaisent, se draguent, dans un langage qui demeure parfois geek…

(ceci est un sms) :

char *Ca_te_dit_de_boire_un_cafe(int ok)

{

if (ok == 1)

return (« yes\n »);

else return (« bah tant pis… ou un thé peut-être ?\n »);

}

…mais parfois pas du tout : je viens à l’instant de tomber sur une page Facebook ouverte par des nageurs. « Spotted Ecole 42 » (spotted qui veut dire « repéré » en anglais) propose aux nageurs de laisser un message anonyme à un « crush » (béguin/amourette) : « Son souvenir te hante, tu n’oses pas lui parler ou tu ne le/la retrouves plus ? Nous t’aidons à lui laisser un message , tu nous l’envoies et on le poste anonymement ! » C’est touchant, cette volonté qu’ont les nageurs de recréer un monde, dans la bulle de la piscine.

Au delà de ça, je pense qu’il serait intéressant (si cela n’est pas déjà fait) que les nageurs interagissent davantage, via les réseaux sociaux ou de façon associative (plus tard quand ils seront admis), afin de générer du réseau de compétences (qui sortent du domaine de la programmation ou non).

Pour avoir beaucoup discuté avec les nageurs, je sais que certains ont une âme d’entrepreneur, d’artiste, de designer, etc. Et étant amenés à travailler ensemble plus tard, c’est plutôt judicieux de fédérer des savoirs/savoirs-faire au sein de l’école et de varier les profils qui seront dans 3 ans sur le marché de l’emploi, voire avant. Je ferai d’ailleurs prochainement un spécial talent dans cette chronique, car il y en a à 42 !

En ce qui me concerne, je vais me coucher et « reset » (réinitialiser).

JOUR 16

Grosse journée aujourd’hui = article court… Juste un petit coucou pour dire que je suis fatiguée et que je n’ai plus le temps de manger. Pour aller au plus vite, je mange ce qui ne demande pas de préparation, donc dans mon cas des céréales (pas le temps d’aller faire les courses non plus) : je suis en train de faire le régime Spécial K « été » sans le vouloir… DAMN!

Plus sérieusement, j’ai découvert un site très bien fait, très pédagogique et complet sur l’apprentissage du langage C : Le pays du 42. Un site, créé par une fille d’Epitech, spécialement pour la piscine j’imagine, qui aide déjà beaucoup de nageurs et qui en aidera beaucoup d’autres en septembre ! La charte graphique est intéressante et s’apparente au « design » d’un terminal, de quoi ne pas être dépaysé !

Sinon dans un autre genre, il y a le site du zéro (aujourd’hui OpenClassrooms) bien connu de la communauté, et encore dans un autre genre Codecademy.

JOUR 17 //SPECIAL TROLL

Autant employés comme nom commun (« une personne qui participe à une discussion ou un débat dans le but de susciter ou nourrir artificiellement une polémique, et plus généralement de perturber l’équilibre de la communauté concernée ») que comme verbe (je trolle, tu trolles, il trolle…), « troll » / « troller » sont des mots que je n’avais jamais autant entendus que pendant la piscine… J’en avais vaguement entendu parler avant mais sans vraiment avoir la bonne définition car « les usagers d’internet emploient plus généralement le verbe « troller » comme synonyme de moquerie provocatrice ».

(Wikipedia)

Le troll est une pratique très largement répandue au sein de la piscine (et plus généralement au sein des communautés des geeks/gamers/…).

Mais de quoi s’agit-il précisément ? Rien de mieux qu’une mise en situation piscinesque pour comprendre…

Contexte : quand un nageur s’absente quelques instants sans fermer sa session

– Le « basique » : flooder (de l’anglais inonder) l’ordinateur du trollé avec des images ou vidéos à caractères pornographiques.

(Vraiment vous avez cliqué ?)

– Le « classique » : faire des « alias » = remplacer une commande dans le terminal par une autre (par exemple, le nageur trollé peut, à son retour, utiliser une commande pour ouvrir un dossier et en réalité le supprimer)

– Le « qui rend fou » : par exemple, mettre le script de la même couleur que le fond du terminal (noir) afin d’observer ensuite le trollé se prendre la tête à ne pas comprendre pourquoi rien ne s’affiche quand il écrit.

– Le « rageux » : supprimer le travail du trollé… méchant mais rare car en général, le trolleur cherche davantage à épater la galerie et à faire rire qu’à ruiner sa victime.

– etc.

Du coup, à la piscine, c’est un peu la guerre des trolls en permanence : coups bas, vengeances, complots, on trouve de tout et il n’y a jamais de trêve. C’est d’ailleurs assez drôle en général !

P.S. : RAV (ç’aurait pu être dans le SPECIAL AMOUR) mais aujourd’hui j’ai reçu des bons pour :

IMAG0079

JOUR 18 //SPECIAL POST-IT

A la piscine, il y a des fans du post-it ! Quand je dis des fans c’est que certains en font tout un art…

WTF@42 – Post It Wars par studios_42

JOUR 19

Dernier jour de ma double vie (avant de la reprendre lundi prochain) et je suis fatiguée…

C’est pas nouveau…

J’ai l’impression de le dire tous les jours.

D’ailleurs, j’écris de moins en moins bien et cela me demande un effort surhumain de traquer les fautes d’orthographe !

J’en suis au point où quand mon réveil sonne le matin, je fais un arrêt cardiaque ! A chaque fois, je ne sais plus où j’habite, je ne comprends pas pourquoi il y a autant de bruit et je mets bien une minute avant de me rappeler :

« Ah oui c’est vrai, il faut que je parte travailler ».

Joie !

J’en suis aussi au point où, le soir quand je dois écrire ma chronique, je bug une heure devant ce truc à faire chanter des chevaux… Il faut cliquer sinon il ne se passe rien…

Alors, puisqu’à partir de demain c’est le weekend et que le rythme pour moi sera moins intense, je me suis dit que j’en avais assez du sempiternel métro-boulot-métro-boulot-métro-dodo… J’ai donc pris une GRANDE décision (et je prends des risques en faisant un effet d’annonce) :

Demain, je dors à 42 !

Normalement il y aura une petite place pour moi, j’ai toujours un bon à utiliser ! ^^

Plus sérieusement, j’ai un peu peur à l’idée de pénétrer dans la cour des miracles, un espace de non-droit, où tout peut arriver.

Il faudra que je pense à emporter ma serviette et un pince-nez !

NUIT 2

Un peu de retard sur la mise en ligne de cette chronique mais c’est normal : d’habitude, j’écris tous les soirs à la fin de ma journée. Ayant dormi à 42 cette nuit, je n’ai pas pu écrire hier soir.

En descendant au sous-sol pour dormir, vers 5 heures du matin, j’étais étonnée de voir autant de monde dormir par terre. En journée, il y a encore quelques retardataires qui dorment mais la nuit, toute la surface du sol est occupée. Il faut presque enjamber les matelas pour se frayer un chemin. Arrivés aux emplacements de nageurs amis, j’ai pu m’installer en essayant de ne pas faire trop de bruit. J’avais amené couverture et oreiller mais on a eu la gentillesse de me prêter un matelas ! Tellement gentils ces nageurs !

Les lumières restent allumées toute la nuit, et ce n’est pas juste des petites veilleuses, c’est le grand éclairage. J’imagine que la raison en est que c’est histoire de ne pas nuire à l’oeil des caméras de surveillance. Moi, cela ne me dérange pas trop car j’ai l’habitude de ne pas dormir dans le noir complet mais j’imagine qu’à la longue ce doit être fatigant pour les nageurs qui dorment à 42 depuis le début de la piscine.

Ah oui et aussi, ça sent mauvais… (au sens propre !), un peu normal au bout de 3 semaines je me dis… et puis je ne pouvais pas faire ma chochotte ; finalement je m’y suis habituée assez rapidement.

J’avais vraiment l’impression d’être au camping : on dort sur des matelas gonflables, dans un sac de couchage, on se lave les dents dans les sanitaires et surtout surtout, on ne sort pas pied-nus. La règle c’est de ne jamais lâcher ses tongs, ici, on ne sait jamais sur quoi on peut marcher…

Sinon, c’est marrant mais effectivement en me réveillant ce matin, il y avait bien un nouveau venu, couché près de nous, que l’on ne connait pas, mais qui doit bien nous aimer ! J’essaie d’imaginer le nageur qui rentre dans la salle vers 6 heures du matin, qui cherche une place pour dormir en balayant la salle des yeux, observant les autres nageurs en train de dormir et qui se dit : « tiens, je vais me mettre à côté d’eux, ils ont l’air sympas ».

En tout cas, j’ai plutôt bien dormi, en dépit des ronflements constants pendant la nuit. Je les entendais d’une oreille et heureusement, j’étais tellement fatiguée que cela résonnait dans ma tête seulement de très loin et j’ai sombré dans un sommeil profond.

Est-ce-que j’aurais été capable de passer un mois à dormir là, je ne sais pas mais en tout cas c’était bien de pouvoir le vivre une fois en vrai.

JOUR 21

Dimanche. C’est la fin de la 3e semaine de la piscine. Ca passe tellement vite…

La semaine s’est passée comme d’habitude : une série d’exercices et un rendu par jour, un exam machine le vendredi, des colles le weekend. Mais la dernière semaine sera différente : un seul projet (un seul exercice) sur la semaine ! C’est donc un exercice vraiment plus complexe qui demande du temps et beaucoup de réflexion. Pour ce projet, on est en binôme et chaque binôme doit s’inscrire en donnant un nom à son groupe. Nous, on s’appelle « Coding Bad » ^^ (en référence à la série Breaking Bad).

Dimanche. Baisse de moral. Je n’ai jamais aimé le dimanche…

Demain je reprends ma double vie. Et ça me met dans un état assez paradoxal… D’un côté, je suis enthousiasmée par ce que je fais et d’un autre je me sens entre deux mondes. Le fait d’avoir passé une nuit à 42 et donc d’être restée plus longtemps que d’habitude avec les nageurs, ça m’a rappelé que l’esprit de communauté est très fort ici. En travaillant la journée à l’extérieur, j’ai l’impression de moins faire partie du monde 42, d’être un peu à part, à l’écart, et ça me rend triste.

Je me dis aussi qu’il ne reste qu’une semaine, que l’on a passé le plus difficile mais que ça va être dur d’accepter la fin de la piscine et de tous se quitter.

Anyway, à chaque jour sa peine. J’espère avoir assez de courage pour finir la dernière semaine !

JOUR 22

La fin de semaine dernière et cette semaine étant un peu plus light, la majorité des nageurs se sont replongés dans les exercices des jours précédents ; refaisant pour certains l’intégralité de la piscine jusqu’à maintenant, soit pour rattraper un retard, soit pour consolider leurs connaissances.

Et c’est une très bonne idée, puisque le projet de cette semaine et le dernier exam machine reprennent, globalement, tout le programme vu depuis le début !

Me concernant, je vais essayer de bosser du mieux possible sur le projet avec mon binôme et de bien réviser pour l’exam machine durant la semaine !

Je m’y mets dès demain !

Autre sujet : ça date de quelques mois, mais pour répondre à certains commentaires questionnant la pédagogie innovante chez 42, et/ou la ressemblance avec Epitech/Epita, voici la vidéo de la conférence de presse donnée par Xavier Niel, Nicolas Sadirac, Kwame Yamgnane et Florian Bucher :

JOUR 23 //SPECIAL TALENTS

Comme je l’avais dit précédemment, il y du talent à 42 ! Certains nageurs ont une activité professionnelle, ont monté leur boite, créent des projets, sont des artistes ! Bref, ce serait dommage de ne pas en parler ici ; aussi un peu pour casser l’image du no-life. Je n’ai pas rencontré tout le monde personnellement donc c’est sûr que je vais oublier de citer des nageurs talentueux…

Pour commencer par eux, les blogueurs qui trouvent un peu de temps pour raconter et faire vivre la piscine au monde extérieur :

Ferrero : la vie d’un chocolat

Nate goes swimming

Les YouTubers :

– La chaîne de Mehdi #rap

– La chaîne de Dan #vlog #podcast

– La chaîne de Jocelyn #piano

– La chaîne de Raphaël #webTV #websérie #aventure

– La chaîne de Yotol #game #tvshow #jeuxvidéos

Les SoundClouders :

– La chanson d’Arthur :

Les créateurs de sites spécialisés :

NokiaDay de Quentin #téléphoniemobile

Skynessi de Matthieu #cloudcomputing

Petit Dev de Matthieu #tutoriels #tech

Les fondateurs de réseaux :

Sug de Lior #réseausocial #bouchesàoreilles

42 Valley de Kévin #réseaupro #compétences #code

Lazijob de Matthieu #réseaupro

Les artistes :

– Mathieu : le post-it artiste dont vous avez pu admirer le travail dans le //SPECIAL POST-IT

– Le portfolio de Pierre-Alexis #graphisme #photographie #vidéo

Un peu de poésie de Yogan

– Les musiques et clips vidéos de Charles sur Staart TV

La planète à personne : Born to be Nobody par un anonyme #BD

– Le Super Studio de Gaël #studio #vidéo #web

JOUR 24

Aie aie aie, c’est bientôt la fin, je n’arrive pas à y croire… Il reste 3 jours : la piscine se termine samedi (7 septembre) soir ! Du coup, d’ici là, tous les nageurs bossent à fond sur le projet final et révisent les bases et plus si affinités pour le dernier exam machine (épreuve finale, samedi).

En ce qui concerne le projet de la semaine, même si on est en binôme, de nombreux nageurs travaillent en groupe, s’aident, réfléchissent ensemble ! La solidarité est toujours là ! D’ailleurs mon binôme me donne des cours particuliers pour m’aider à rattraper mon retard ^^ parce que mine de rien, je rate beaucoup de notions en ne venant que le soir depuis 10 jours. En parlant de solidarité – je m’adresse à vous piscineux si vous lisez ce blog – des nageurs ont créé un Google Doc qui permet de tester votre code et de vérifier qu’il s’exécute selon les consignes demandées. Donc allez y faire un tour, c’est validé par le staff !

Sinon, à part ça aujourd’hui, il y a eu le… « MEGATRON » (tadaaam !)

Le Mégatron, c’est – j’en suis sûre – un des 12 critères qui entrent en paramètre de compte pour l’admission à 42. Il s’agit pour chacun d’entre nous d’attribuer un vote à 10 nageurs de notre choix, histoire de les récompenser pour leur sympathie/aide/collaboration/etc. Quand un nageur a reçu au moins 10 votes (je crois), il a validé un des 12 critères qui déterminent sa réussite à la piscine. Cela afin de sélectionner des candidats qui sont aimables/aimés des autres, capables de sociabiliser, de travailler en groupe, d’être solidaires et d’aider ceux qui en ont besoin. En bref, c’est le côté humain d’un candidat qui est mis ici en valeur et ça, c’est important pour 42. Evidemment, personne ne saura jamais combien de personnes ont voté pour lui, ce serait trop sadique… Parce que c’est sûr, certains auront peut-être 30-50 votes et d’autres moins de 10, et ce serait insupportable de s’auto-juger et de se démoraliser sur ce critère unique. Je trouve que ce critère est important (il permet de révéler au staff les excellents pédagogues de la piscine et ceux qui donnent de leur personne) mais heureusement, il reste anonyme et il y en a 11 autres !

JOUR 25

Ca fait du bien un peu de soleil…

WTF@42 – Tu connais la dance dance ? par studios_42

L’ambiance est là ! Mais personne ne perd de vue qu’il ne reste plus qu’une journée pour travailler sur le projet et réviser pour l’examen final.

On est tellement proche de la fin et pour certains, l’issue de la piscine changera leur vie à jamais pour dessiner les contours d’un avenir qu’ils ne soupçonnent pas encore. C’est tellement étrange de pouvoir y assister avant que ça n’arrive… Parmi les nageurs de la piscine d’août, il y a sans doute de futurs génies, entrepreneurs, créateurs, sans doute aussi que certains vont contribuer à quelque chose de grand et de beau, accoucher d’une révolution dont on n’imagine pas aujourd’hui la portée…

C’est étourdissant !

Dans 10 ans peut-être ou même avant, je pourrais dire “ j’ai fait la même piscine que ce mec qui a changé le monde…”

Ce délire sur l’avenir me rappelle le Festival International de Twitterature, nommé “140 max”, qui avait eu lieu au Québec il y a bientôt un an à l’occasion duquel les participants étaient conviés à imaginer le futur en 140 caractères. Et j’ai envie de proposer le mien : “Je vous parle d’un temps que les nés maintenant ne peuvent pas connaître : un futur, dont les arabesques dessinent probablement l’inattendu.”

Et le pire c’est que c’est ça qui va se passer !

Bon allez je divague là, il faut que j’aille dormir.

P.S. : Si certains se sentent inspirés, n’hésitez pas à m’envoyer via le formulaire de contact votre vision de l’avenir en 140 max, je les publierai ici ! *

*

“Est en train de naître un monde, que nos grand parents ne pouvaient imaginer, car nés dans un monde que nos enfants ne pourront qu’imaginer.”

“Dans 6 x 7 millions d’années, exit les religions, les politiques, le G20, l’ONU. Le monde sera régenté par 42 geeks et un savant fou virtuel que tout le monde appellera Xav”.

JOUR 26

Ca y’est c’est la fin de la dernière journée « normale » de la piscine et demain c’est le D-Day !

L’exam machine !

Un examen qui dure 8 heures, de 12h00 à 20h00. J’espère que j’arriverai à bien me souvenir de tout ce que j’ai révisé…

J’ai du mal à réaliser que c’est la fin mais je n’ai pas le temps de l’écrire, il faut que je dorme…

A demain, si j’ai survécu… ^^

DERNIER JOUR

Hier, samedi 7 septembre, c’était le dernier jour… Une journée qui a consisté en très grande partie à passer l’exam machine final. Xavier Niel et les caméras de France 3 (je crois) étaient là pour clôturer cette piscine d’août ! Nous allons sûrement passer au journal télévisé très prochainement je pense !! Ambiance particulière donc… légèrement solennelle et un peu triste. Nous avons dû poser notre badge sur les bureaux pendant l’examen afin que le staff le ramasse… Et donner le maximum sur une dernière épreuve qui peut être déterminante (elle sert pour le staff à avoir une idée générale de notre niveau en fin de piscine, de ce que l’on maîtrise, de ce que l’on a acquis et de notre capacité à étudier à 42).

Evidemment, je n’ai pas tenu les 8h d’examen… Compte tenu de mon niveau difficilement atteint avec mon emploi du temps de ces derniers jours, j’ai fait le maximum. J’ai même rendu des exercices, que je savais faux, pour montrer que j’avais essayé de les faire et comment, parce que parfois, je n’étais pas loin de la bonne réponse. J’ai donc attendu une partie de l’après-midi que mes amis-nageurs sortent de l’épreuve, les accueillant l’un après l’autre, parlant de l’examen, de la fin de la piscine. J’ai même rencontré des nageurs de septembre super sympas. Encore une fois, des profils variés et intéressants…, voire drôles malgré eux :

Après que je lui ai dit que je ne connaissais pas tel jeu (je ne sais plus lequel), l’un d’entre eux, interdit, (ayant essayé, il me semble, presque tous les jeux vidéos existants), m’a sorti : “Mais t’as vécu dans une grotte ces deux dernières années ou quoi ??” Et c’est marrant, parce qu’au même moment, j’ai ri dans ma tête et je lui ai répondu intérieurement : “Mais c’est toi qui as vécu dans une grotte…”. Extérieurement, les mots qui me sont sortis de la bouche ont été très précisément : ”Ben… heu… mpffgn… heu mais en fait j’suis pas une geek moi”. Bref ^^ touchant ces geeks !

Après que tout le monde soit sorti, on est resté entre nageurs, une bonne partie de la nuit, n’arrivant pas à se quitter… On n’avait pas vraiment envie de se dire au revoir. Certains ont repris le train pour rentrer dans leur province natale, d’autres, parfois encore plus loin et les autres un peu plus tard dans la soirée sont rentrés chez eux à Paris.

En attendant les résultats qui tomberont dans 2 semaines (mais peut-être moins) pour une rentrée en novembre, on se rappellera tous de cette formidable expérience, dure, exigeante, parfois minante mais belle et très riche en rencontres, en connaissances, en découvertes et surtout en émotions.

En attendant, pas de stress inutile, pas de noeuds au cerveau ; la décision ne dépend plus de nous ! Les dés sont jetés ! Alors ne criez pas avant d’avoir mal !

En attendant, je vous aime mes ptits geeks ! Vous allez me manquer !

P.S. : Je retourne à la vie normale, je vais me refaire une santé, me peser et bien évidemment, je vous tiendrai au courant sur cette page des résultats !

 

fin-piscine-42

EPILOGUE

Beaucoup plus tôt que prévu, nous avons eu aujourd’hui les résultats de la piscine d’août ! Le teasing insoutenable de la part du staff de 42 a démarré dans l’après-midi et a stressé tout le monde ; notamment un tweet, responsable de 42 crises cardiaques dans la minute :

Comme vous pouvez le voir, 42 a retenu 295 élus pour venir étudier à partir de novembre ; et on a tous attendu les doigts croisés que le verdict tombe par mail, actualisant la page toute les 30 secondes… Et finalement le mail est arrivé ! Mon coeur est devenu un tambour et j’ai arrêté de respirer pendant quelques secondes…

Ceux qui n’ont pas été sélectionnés ont reçu :

Bonjour,

Après être passé par l’épreuve de la Piscine, nous avons le regret de t’informer que tu n’as pas été sélectionné pour intégrer 42.

Ce mois avait pour but de tester si notre méthode d’apprentissage pouvait te convenir. D’autres formations en informatique existent et sauront être plus adaptées à ton mode de fonctionnement : ton mois d’apprentissage à 42 te sera partout ailleurs utile pour mieux les aborder.

Cordialement,

Le Staff 42

Et ceux qui ont été sélectionnés ont reçu :

Bonjour jeune novice…

… ou plutôt, jeune cadet ?

Après être passé par l’épreuve de la Piscine, tu as été sélectionné pour intégrer 42 dès la prochaine rentrée.

Nous te communiquerons dans les prochains jours des détails supplémentaires pour valider définitivement ton inscription. Félicitations… et bienvenue dans les trois meilleures années de ta vie !

Une petite précaution : si la Piscine t’est apparue redoutable, les trois prochaines années sauront encore plus te pousser dans tes retranchements

Cordialement,

Le Staff 42

J’arrête le suspens ici pour vous dire que… malheureusement, je n’ai pas été admise à 42… C’est la vie… Let it be !

Je suis déçue et partage ma peine avec ceux qui connaissent le même sort que moi mais je suis heureuse pour ceux qui sont admis, parmi lesquels de nombreux nageurs-amis ! Un très bel avenir s’annonce pour eux !

Les chroniques d’une noyée vous semblent peut-être terminer sur une note négative mais je ne vois pas les choses comme ça. Et je ne veux pas que cela décourage les futurs nageurs. Concentrez-vous sur vos objectifs et sur vos rêves. Personnellement tout ce qui m’est arrivé dans la vie (négatif ou positif) a toujours eu un effet bénéfique à court ou long terme ! je ne regrette rien et envisage l’avenir avec passion, détermination et sérénité.

Ca me manque déjà et ça va longtemps me manquer de ne plus raconter mes journées le soir ^^ J’espère pouvoir revivre et partager une aussi belle expérience !